L’Intelligence artificielle au service de la révolution agroécologique

Pour réconcilier nature et technologie, l’intelligence artificielle est un facilitateur.

95% des aliments qui nous nourrissent viennent du sol.

L'érosion et la dégradation des sols constituent un danger pour notre sécurité alimentaire. "En diminuant les éléments nutritifs disponibles pour les plantes ainsi que l’espace dont elles disposent pour s’enraciner, l’érosion peut réduire le rendement des cultures jusqu’à 50 %", note la FAO, "De plus les cultures qui poussent ont tendance à être de moins bonne qualité : difformes, plus petites et moins nutritives".

Au niveau mondial, la baisse de fertilité et celle des rendements agricoles due à la baisse de biodiversité des sols ont un coût. Selon la Fondation pour la recherche sur la biodiversité, "Cela représente un coût de 40 milliards de dollars par an aujourd’hui et ce chiffre va aller en s’aggravant rapidement".

Comment réussirons-nous à nourrir la planète malgré ce constat de l’appauvrissement inexorable des sols ? Pour nous, ce caractère inexorable n’est pas une fatalité. Nous avons les ressorts et les ressources pour rendre les sols fertiles à nouveau. L’agriculture régénératrice permettra de changer les pratiques. De nombreuses solutions innovantes de l’« Agritech » le permettent déjà.

De la nature à la DeepTech

MYCOPHYTO est une DeepTech innovante, dont la technologie de rupture promet de transformer durablement les usages pour une meilleure résilience de nos sols.

Notre enjeu est de travailler sur la régénération des sols, leur revitalisation pour répondre à des enjeux de décarbonation de l’agriculture, d’adaptation aux changements climatiques et de souveraineté alimentaire. On se doit de produire plus et mieux avec moins.

Pour repenser le modèle agricole, il faut s’inspirer de la nature et utiliser nos connaissances scientifiques. Nous nous inspirons d’un concept naturel de plus de 450 millions d’années d’associations bénéfiques entre les plantes et des champignons du sol qu’on appelle mycorhizes. Ces champignons se développent dans et autour de la racine en créant un réseau immense d’hyphes, des racines microscopiques qui vont perfuser les racines de la plante. Cette symbiose va permettre à la plante de puiser des éléments nutritifs dans le sol et d’être mieux nourrie, de booster ses défenses naturelles et de s’adapter à la sécheresse en maintenant l’humidité à proximité des racines. Ils vont aussi créer un écosystème riche avec les bactéries ce qui va contribuer à la régénération des sols.

On peut donc avoir plus de fruits, de fleurs, avec moins d’engrais, moins d’eau. Mais ces champignons ont largement disparu ou sont en quantité trop faible dans les terres anthropisées comme un terrain agricole ou pire encore des espaces verts dans nos villes.

Défi de la transition agro écologique

Les nouvelles générations d’agriculteurs ont pleinement conscience des défis qu’ils ont à relever. Pour ceux qui se lancent dans cette aventure, il est essentiel d’adapter ces métiers à notre temps. La technologie a permis de nombreuses avancées, notamment pour réduire la pénibilité de certaines tâches fastidieuses et cela va évidemment dans le bon sens.

Pour accompagner un maximum d’agriculteurs dans cette transition, l’intelligence artificielle est un outil incontournable. Elle permet d’accélérer la rapidité des diagnostics, d’élargir les zones cibles et de gagner en précision, gagner du temps.

Intelligence artificielle et champignons mycorhiziens

Comme dans les diagnostics médicaux, notamment liés aux analyses de cellules et à la recherche de lésions, l’Intelligence Artificielle peut nous aider dans la recherche de cellules de spores de champignons mycorhiziens arbusculaires des sols.

Si nous devions avec nos pelles faire des trous partout pour chercher des Champignons mycorhiziens arbusculaires (CMA). Puis tester toutes les combinaisons possibles entre 300 espèces de champignons existantes compatibles avec 85% des plantes de la planète. Ce travail titanesque nous prendrait des années que nous n’avons pas…

Membre de l’Institut de l’Intelligence Artificielle 3IA de Sophia Antipolis, nous avons un partenariat de R&D avec INRIA depuis 2019 sur le développement d’un algorithme pour prédire les bonnes combinaisons espèces de CMA/plantes. Cette technologie nous permet de prédire les meilleures combinaisons basées sur toutes les data que nous agrégeons à notre algorithme : données sur la qualité et la nature des sols, données sur le climat, sur son évolution, données sur les cultures et les plantes, le tout renforcé par nos expérimentations faites sur le terrain.

Dans notre contexte, cette utilisation de l’Intelligence Artificielle reste un challenge du fait d’un manque de connaissances du microbiome du sol. Nous avons beaucoup à apprendre de ces organismes et avons un temps de retard scientifique en comparaison avec les avancées de connaissances sur le microbiome humain.

Pour faciliter l’accélération et la détection de ces spores, la numérisation des images est une avancée non négligeable.  Pour quantifier les impacts d’une solution, il est important que l’agriculteur puisse en voir les effets. Cela n’est pas aisé quand on travaille sur un produit à base d’organismes microbiologiques invisibles à l’œil nu.

En collaboration avec une start up Spin off de l’INRIA, nous développons des outils de mesure d’impact à partir de prises de photos réalisées directement par l’agriculteur sur sa parcelle. Détecter les carences et les maladies de la plante précocement, est un espoir, notamment pour réduire l’utilisation de produits de synthèse. En effet, la bonne santé d’un sol s’induit par des méthodes préventives. Prendre soin de la plante et du sol pour éviter d’avoir à répondre aux agresseurs par du curatif ce qui revient, comme cela a été dit, à apporter une solution non biologique en forte dose.

Algorithme, big data, drones, biobanque, industrialisation des pratiques culturales, les solutions ne manquent pas pour répondre aux enjeux qui sont les nôtres. L’intelligence artificielle est à mettre au service d’un projet commun, un projet qui fait sens. L’avenir des sols, de la planète et donc de l’humanité est donc un noble défi dans lequel il faut inscrire ce progrès.